Le recours aux pratiques de soins non conventionnelles que l’on appelle aussi « médecines douces », « médecines alternatives », « médecines complémentaires » concernerait 4 Français sur 10 [1]. L’Organisation Mondiale de la Santé recense plus de 400 pratiques non conventionnelles à visée thérapeutique. Cet attrait peut s’expliquer par une recherche de soins de bien-être, de soulagement des maux du quotidien par la population mais aussi par des raisons sociétales (système de santé en difficulté, manque de temps médical, et inégalité d’accès aux soins). Le but de cette page est d’avoir une vision éclairée sur ces pratiques, et de prendre connaissance des ressources disponibles mises à disposition par les autorités compétentes pour s’informer et savoir identifier certaines dérives thérapeutiques ou techniques illusoires.
1. Les professionnels de santé et la médecine conventionnelle
Il semble important dans un premier temps de rappeler que le code de la santé
publique définit la liste des professionnels de santé et les classe en trois catégories [2] :
• Les professions médicales : médecin, chirurgien-dentiste ou odontologiste, sage-femme. (art.
L4111-1 à L4163-10)
• Les professions de la pharmacie : pharmacien, préparateur en pharmacie, préparateur en
pharmacie hospitalière. (art. L4211-1 à L4252-3)
• Les auxiliaires médicaux, aides-soignants, auxiliaires de puériculture et ambulanciers :
infirmier ou infirmière, masseur-kinésithérapeute, pédicure-podologue, ergothérapeute,
psychomotricien, orthophoniste, orthoptiste, manipulateur, électroradiologie médicale,
technicien de laboratoire médical, audioprothésiste, opticien-lunetier, prothésiste et orthésiste
pour l'appareillage des personnes handicapées, diététicien, aides-soignants, auxiliaires de
puériculture, ambulanciers. (art. L4311-1 à L4394-4).
L’ensemble des professionnels de santé sont titulaires d’un diplôme, certificat ou titre
après avoir suivi des études dont le programme est validé par le ministère de la santé et/ou le
ministère de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur.
Pour sept de ces professions [3], il existe des organismes privés chargés d’une mission
de service public, ce sont les ordres professionnels. L’inscription à l’ordre de sa profession est
obligatoire pour chaque professionnel. Leurs rôles sont multiples : administratif, arbitral, mais
aussi disciplinaire en veillant au respect de la déontologie de chaque profession [4].
Les articles L4161-1 à L4161-6 du code de la santé publique ont pour but de définir le
délit d’exercice illégal de la médecine. Il est constitué lorsqu’une personne ne disposant pas
du diplôme de médecin, chirurgien-dentiste ou sage-femme pose un diagnostic ou traite une
maladie. La peine encourue est de deux ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende.
L’obligation de formation pour les professionnels de santé ne s’arrête pas au diplôme
initial. Ainsi tout au long de sa carrière, tous les professionnels de santé ont une obligation de
formation continue triennale. Ce Développement Personnel Continu (DPC) a pour but
d’évaluer et d’améliorer les pratiques mais aussi de maintenir et actualiser les connaissances
et compétences. Il est obligatoire de rendre compte de la réalisation de ces formations auprès
d’organismes de contrôle (l’ordre pour les professions concernées, employeurs pour les
salariés sans ordre, ou Agence Régionale de Santé pour les autres) [5]. Le DPC fait partie du
dispositif de certification périodique mise en place pour les professions à ordre depuis janvier
2023 [6].
La totalité des codes de déontologie des professions à ordre (médecins, sages-femmes
pharmaciens, chirurgiens-dentistes, infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes, pédicures-
podologues) comporte un article qui reflète une exigence commune de dispenser des soins
conformes aux données acquises de la science. Cette exigence est indispensable pour assurer
la qualité et la sécurité des soins pour les patients [7].
L’ensemble des professionnels de santé dispense donc une médecine que l’on peut
nommer « médecine conventionnelle » basée sur des preuves scientifiques (essais cliniques)
et dispensant des traitements fiables avec un consensus professionnel important.
2. Points d’éclairages sur les Pratiques de Soins Non Conventionnelles (PSNC)
a) La formation
Il existe une grande diversité de techniques et des fondements théoriques multiples
lorsque l’on aborde le sujet de ces PSNC.
Selon le Ministère de la santé, le seul point commun à toutes ces pratiques est leur
manque de reconnaissance en particulier sur le plan scientifique par la médecine
traditionnelle. De plus, il n’existe pas d’enseignement de ces techniques durant la
formation initiale des professionnels de santé [8].
Un grand nombre de personnes ont suivi une formation avant d’exercer une PSNC,
cependant on constate une grande variabilité au niveau de la durée (d’un simple week-end
à plusieurs années) et des modalités (distancielles ou présentielles).
Il n’existe pas de diplôme d’état, de certification ni d’agrément officiel pour pouvoir
exercer ces pratiques. Ainsi les termes souvent mis en avant de « diplômé », « certifié » ou
« agrée » ne sont pas un gage de reconnaissance par les autorités [9].
Il existe des cas particuliers concernant des techniques complémentaires, à ce jour, le Conseil
National de l’Ordre des Médecins (CNOM) reconnait trois procédés thérapeutiques, lesquels
font l’objet d’un enseignement optionnel dans certaines universités (Diplômes Inter
Universitaires) :
- L’acupuncuture,
- La thérapeutique homéopathique,
- La médecine manuelle - Ostéopathie médicale. L’Ostéopathie est aussi une
formation complémentaire pour les sages-femmes, infirmiers et kinésithérapeutes.
L’ostéopathie (non médicale) peut être aussi exercée par des personnes n’étant pas
professionnels de santé, avec un diplôme délivré par des établissements agréés.
b) Eléments de vigilance
La Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des
Fraudes (DGCCRF) en 2018 a contrôlé 675 praticiens proposant des PSNC, plus des
deux-tiers présentaient un manquement (défauts d’information, exercice illégal de la
médecine, allégations thérapeutiques, usurpation de titre, pratiques commerciales
trompeuses avec dans quelques cas des risques pour les patients).
La DGCCRF alerte aussi sur des manquements concernant le prix de la prestation
proposé par les praticiens, ainsi au-delà de 25 euros une note doit être remise au
consommateur avant paiement. Il est à noter que de plus en plus de praticiens s’y
conforment car de nombreuses mutuelles proposent un remboursement de ces PSNC [9].
Le ministère de la santé recommande l’établissement d’un devis car les honoraires totaux
des actes de PSNC peuvent se révéler élevés [8].
La MIVILUDES (Mission Interministériel de VIgilance et de Lutte contre les DErives
Sectaires) alerte de son côté sur le fait qu’il n’existe pas d’évaluation indépendante et
rigoureuse des techniques et formations de ces PSNC. De plus de nombreuses PSNC
utilisent des méthodes diverses pour se faire connaître comme des colloques, séminaires,
salons de bien-être avec souvent la vente de produits complémentaires thérapeutiques. Il
est aussi constaté l’invention d’« ordres » pseudo-professionnels. La MIVILUDES
constate que 40% des signalements des dérives sectaires concerne le domaine de la santé.
Il est aussi important de noter que 60% des patients malades du cancer ont recours aux
PSNC [1].
La loi n° 2024-420 du 10 mai 2024 visant à renforcer la lutte contre les dérives
sectaires et à améliorer l'accompagnement des victimes apporte un élément important avec
la création d’un nouveau délit de provocation à l’abandon ou l’abstention de soins [11]. En
effet, comme le souligne l’Académie nationale de médecine, certaines PSNC incitent à
l’abandon du traitement de médecine conventionnelle et peuvent aboutir à la perte de
chance de guérison ou d’amélioration de maladies graves avec des retards de diagnostic
ou d’échappement aux soins médicaux indispensables, avec d’importantes conséquences
pour les patients [12].
En cas de doute sur un traitement de PSNC, sur son efficacité ou d’aggravation de ses
symptômes, il est de bon sens de consulter son médecin traitant, un médecin de son choix
ou le cas échéant les services d’urgences [8].
c) Ressources utiles avant de recourir aux PSNC
Le ministère de la santé propose des fiches d’information permettant d’avoir une vision
claire sur certaines PSNC à savoir : l’hypnose, la mésothérapie, l’ostéopathie, la fish pédicure,
la chiropraxie, la biologie totale, le jeûne à visée préventive et thérapeutique, l’acupuncture et
l’auriculothérapie. Elles sont consultables sur ce lien : https://sante.gouv.fr/soins-et-
maladies/qualite-des-soins-et-pratiques/securite/article/les-pratiques-de-soins-non-
conventionnelles.
Le CNOM dans un rapport de juin 2023 sur les pratiques de soins non conventionnelles
propose lui aussi des fiches d’information concernant : l’access bars consciousness,
l’aromathérapie, l’auriculothérapie, la biologie totale, la chondropraxie, les constellations
familiales, l’étiopathie, les fleurs de Bach, la gemmothérapie, la géophagie, l’haptonomie,
l’hydrothérapie du côlon, l’hydrotomie percutanée, l’hypnose, l’iridologie, le jeune
thérapeutique, la kinésiologie, la lithothérapie, la médecine anthroposophique, la médecine
holistique, la médecine quantique, la naturopathie, la ventousothérapie. Ces fiches sont
présentes en annexe 3 de ce rapport consultable sur ce lien : https://www.conseil-
national.medecin.fr/publications/communiques-presse/pratiques-soins-conventionnelles.
Dans une même logique, le Conseil National de l’Ordre des Infirmiers propose lui aussi
des fiches sur douze pratiques : l’art-thérapie, l’Auriculothérapie, le décodage biologique, la
fasciathérapie, l’hypnose Ericksonienne, la médecine anthroposophique, la médecine
intégrative, la méditation de pleine conscience – mindfulness, la naturopathie, la réflexologie,
la sophrologie, la thérapie trans-générationnelles. Elles sont disponibles ici :
https://www.ordre-infirmiers.fr/position-du-conseil-national-de-l-ordre-des-infirmiers-sur-les-
pratiques-non-conventionnelles-de.
De son côté, l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes propose un tableau des techniques
illusoires avec des informations détaillées sur : la microkinésithérapie, la fasciathérapie, la
biokinergie, la kinésiologie appliquée et la kinésiologie énergetique, le reiki, « coach »
regenere, la technique de l’arc en ciel, l’emotional freedom techniques, l’ostéopathie
viscérale, l’ostéopathie crânienne, la thérapie quantique intégrative, le décodage biologique,
transmission vibratoire, la ventouso-thérapie, la biorésonnance-étioscan, la réflexologie
plantaire, la képhréno-thérapie, sens biologique des symptôme, la résonnance énergétique par
stimulation cutanée. Ce tableau est disponible via ce lien : https://www.ordremk.fr/je-suis-
kinesitherapeute/techniques-illusoires/.
Le Conseil National de l’ordre des chirurgiens-dentiste quant à lui, alerte sur la création
d’un métier et d’une formation de « denturiste » qui n’a aucune reconnaissance ni autorisation
en France [13].
La MIVILUDES propose un dépliant d’information dont le titre est « cancers, attention
aux traitements miracles » via ce lien : https://www.miviludes.interieur.gouv.fr/quest-ce-
quune-d%C3%A9rive-sectaire/o%C3%B9-la-d%C3%A9celer/sant%C3%A9.
Références
[2] https://www.legifrance.gouv.fr/codes/texte_lc/LEGITEXT000006072665
[3] https://www.ordres-sante.fr/
publiques-cour-des-comptes-chambre?_lg=fr-FR
[5] https://www.agencedpc.fr/le-dpc-en-pratique
[6] https://esante.gouv.fr/certification-periodique-PS
[7] Articles R.4127-32, R.4235-2, R.4127-317, R.4312-8, R.4321-2, R.4322-2 du Code de la santé publique
[11] https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000049523123
Mis à jour le 07 Janv. 2025